The magic Porridge PotJournal de résidence

Conversation entre Daniel Dewar et Douglas Park

Douglas Park : Michelle et Hendrik ont tous les deux dit que les oeufs de café ont explosé dans leurs mains alors qu'ils essayaient de comprendre de quoi il s'agissait !

Daniel Dewar** : Quels oeufs de café ?

DP** : Il semble que personne n'en ait vus ici avant, ni nul part ailleurs... Des oeufs de café, comme des grains de café géants que l'on est censé pulvériser dans un filtre. A moins de les mettre directement dans le bocal à poisson rouge.

DD** : Est-ce que tu peux décrire ce qui s'est passé ici aux Arques ?

DP** : Ici, aux Ateliers des Arques, il semble qu'au cours de nos trois visites, et peut-être avant celles-ci et aussi pendant nos absences, nous avons travaillé mentalement et physiquement, nous avons lutté, souffert peut-être, cherché des idées pour savoir que faire de cette opportunité, de cette responsabilité. Comme une promesse sans fin, une anxiété (parce que quelque chose va toujours arriver); une sorte de purgatoire à double tranchant, tout à la fois agréable, bienveillant, mais aussi à la limite de l'infernal. Peut être pas infernal mais en tous cas déplaisant, comme l'angoisse d'une attente sans fin. Comme par exemple, cet entretien que nous faisons maintenant comme prévu mais que nous avons attendu de pouvoir faire. A part cela, ça a été très agréable. Même si nous avons tous une idée de ce que les uns et les autres préparent, il y a eu beaucoup de réunions et d'engagements, d'échanges et de collaborations. Il y a aussi beaucoup d'excitation et de tension, mais il faudrait trouver un terme hybride pour ce sentiment afin d'exprimer simplement, d'un point de vue pratique, de quelle manière les choses se mettent en place pour la grande inauguration / exécution publique / événement de lancement et de vernissage qui se déroulera samedi, puis ensuite dans le cadre de la publication du catalogue.

DD** : L'une des idées que je voulais aborder était celle de la communauté et du village. Il semble que nous ayons tous décidé de nous concentrer sur le village au lieu de travailler à l'extérieur. Peut-être parce que nous vivons dans des grandes villes ? Nous avons décidé de rester dans le village, comme s'il s'agissait d'un contexte urbain...

DP** : Oui, la plupart d'entre nous voeint le village ainsi.

DD** : Owen a peint plus de deux cent soixante dix tableaux depuis qu'il est arrivé aux Arques. Un tableau pour chacun des habitants du village. Ses toiles les plus récentes représentent d'ailleurs des anseignes de magasins.

DP** : Ces enseignes, pour tous les petits commerces que l'on peut trouver dans les villages ou les villes, il prévoit de les accrocher sur des façades ou même dans des lieux ruraux, des forêts, des endroits pastoraux ou arcadiens. Je me souviens que nous avions discuté avec Michelle de cette idée que le village constitue un espace au-delà duquel il n'y a plus de réalité. C'est presque comme un cliché, cette idée que l'on est soumis à une sorte de champ de force immatériel, pas pris comme dans du verre, mais enfermé comme dans une boule à neige, sous un dôme, dans une cloche.

DD** : C'est ce que l'on peut voir dans son film ?

DP** : Un microcosme.

DD** : Oui. Liza a réussi, elle, à sortir du village. Sa photo d'un déplacement en voiture, un campement sur une aire de repos... Comme tu l'as décrite, "une collaborationavec autocuiseur, le cliché mental d'une sortie nocturne sur un parking".

DD** : Puis il y a l'installation d'Emmanuelle, qu'elle a décidé de réaliser au centre du village...

DP** : C'est le travail le plus visible, elle utilise la vitrine de l'espace d'accueil des Ateliers des Arques comme un showcase. Même si je suppose que le public ne sera pas autorisé à entrer pour explorer ce que j'ai décrit comme : " un environnement d'atelier" (des outils, des matériaux et autres "témoignages" d'un "travail" et d'une "productivité") réalisé et présenté dans une chambre de verre. Ce qui, d'une certaine façon, se rapporte aux travaux qu'elle a réalisés ailleurs, soit sous la forme d'installations, soit sous la forme de photographies de ces environnements d'atelier prises par un photgraphe professionnel. Mais Emmanuelle semble travailler et jouer plus intensément que la majorité des artistes sur ce processus de travail en atelier pour créer une oeuvre, plutôt que d'envisager le processus comme une oeuvre; d'éternels changements d'avis, des plans et des circonstances. Je ne suis pas sûr, ce work in progress a t il été documenté ?

DD** : Je ne crois pas, non.

DP** : Les images que j'ai vues sont de grandes photographies murales. Dans ce livre "Stellatopia", dont la couverture est infra mince, inconséquente et cartonnée. Pour cette exposition, elle a fait ce qui ressemble à un hôpital psychiatrique ( ce que j'appellerai plutôt "un ancien hôpital psychiatrique radié, défroqué"). "Stellatopi". Je ne comprends pas s'il s'agit là d'un processus documenté ou d'un produit fini.

DD** : Je crois que l'atelier est utilisé, organisé pour la photo.

DP** : Mais elle y travaille dur, beaucoup plus dur que nombreux artistes, qu'ils le fassent dans le but de créer une oeuvre ou de travailler sur cette notion d'atelier. Dans l'acte présent de création interviennent encore une fois, d'incessants changements, soit par choix, par mérite, par circonstance ou autre, soit en fonction de la manière dont l'oeuvre vivra ou sera présentée. Avec ou sans connaissances, on devra imaginer ce que sont ces objets, ces aménagements. En voyant par exemple ce grand moulage en plâtre coloré, il faudra imaginer l'objet qu'il a servi à créer, les outils utilisés, aussi imaginer comment et pourquoi crtains objets ont été détruits; ce qui fait simplement partie d'un environnement de travail et ce qui est réellement oeuvre ou en rapport avec la production de l'oeuvre. Il y a une grande part de mystère et de jeu dans l'invention - quoique je ne sois pas sûr que le terme "d'invention" soit très adéquat, car le travail d'Emmanuelle est très physique, matiériste et présent - mais cela pourrait en être l'une des nombreuses facettes.

DD** : Si nous parlions du village de nouveau... Ne pourrait-on pas considérer cet endroit comme une figure abstraite ?

DP** : Une figure abstraite ? On croirait entendre la description d'une statue d'Ossip Zadkine !

DD** : Plutôt alors comme la figure conceptuelle d'une ville, d'uns espace urbain ...

DP** : Un exemple, un échantillon ?

DD** : Il y a la mairie, le musée Ossip Zadkine...

DP** : L'église, le restaurant; il y a aussi la cabine téléphonique près du restaurant, c'est là-bas que nous emmenons nos poubelles, nos corbeilles, notre camelote, nos ordures, nos rebuts.

DD** : Et maintenant il y a aussi le C.C.L.A, le Centre Culturel Les Arques.

DP** : The arts center; la kunsthalle; le musée d'art moderne.

DD** : Il s'agit en fait simplement d'une ancienne grange avec des objets dedans. Le fait de lui donner cette dénomination suffit-il à en faire un centre culturel ?

DP** : Il pourrait en devenir un, on en sait rien ! Il est impossible de savoir quels seront les usages futurs du bâtiment.

DD** : Pourrais-tu me parler du projet du Centre Culturel Les Arques ?

DP** : Et bien, comme beaucoup d'espaces d'exposition où l'on produit des événements, des projets d'art contemporain, le Centre Culturel prend place dans un bâtiment qui autrefois avait une fonction aujourd'hui considérée comme "défroquée, radiée"; un bâtiment dont l'histoire et l'architecturese distinguent. Dans un contexte urabain, on parlerait d'usage post-industriel. On remarquera qu'en ville, hormis ces lieux plus académiques et institutionnels qui sont installés dans d'anciens hôpitaux militaires - Chelsea Millbank à Londres, le Stuzki à Warsaw, le HISK à Ghent, la plupart des kunsthalles - les espaces et musées d'art contemporain réemploient la plupart du temps d'anciennes usines ou centrales électriques construites à l'ère industrielle - la Tate Moder, le Wiels (une ancienne brasserie), la Baltic Exchange à Newcastle...
Il y a aussi de nombreux espaces de ce type dans des régions plus reculées : il y avait le LYC Museum & Art Gallery dans le nord de l'Angleterre, j'y allais quand j'étais enfant. Il y a ce centre d'art dans les îles écossaises; dans le Limousin aussi, près de Limoges, le Centre International d'Art et du Paysage où j'ai participé à un événement. Il y a aussi les FRAC, comme celui qui est sensé être à Nantes mais qui se trouve en fait à Carquefou - La Fleuriaye : située en plein milieu de nulle part, ce lieu questionne les notions de régionalisme et de décentralisation pour les amener à leur paroxysme.

DD** : Pourrais-tu nous parler de cette idée de centre ?

DP** : Le centre. Ce n'est jamais évident de savoir ce dont il s'agit ni où il se trouve. L'univers se compose en fait de régions et de provinces et pas de centres et de capitales.

DD** : Et à propos de l'idée d'avoir un centre ici aux Arques ?

DP** : Si comme si cela pouvait être quelque chose de positif pour les habitants, pour le quartier. Un facteur positif pour l'économie. Que l'on nous demande ou pas notre implication, notre avis, il est possible que ce centre se développe en ce sens.

DD** : Et cela constituera un développement correct du point de vue politique ?

DP** : Cela me rappelle l'oeuvre qu'avait réalisé Marcel Broodthaers sur la plage, à Ostend. Il s'agissait du plan d'un musée, qui faisait d'ailleurs peut-être partie du "Musée d'Art Moderne, Département des Aigles". Il avait tracé ce plan à l'échelle dans le sable, un peu comme s'il s'agissait du dessin des fondations du bâtiment.

DD** : Que penses-tu du fait que nous ayons décidé de l'appeler Centre Culturel et pas Centre d'art ?

DD** : Le terme "culturel" suggère qu'on y programme des concerts, des lectures, des ateliers, toutes sortes d'activités et de projets y sont présentés et interprétés. On utilise cet espace intérieur, voire extérieur quand il y en a un, de manière mutualisée, en collaborant avec d'autres organisations et d'autres groupes.
...
Je remarque que nous sommes tous les deux silencieux tout d'un coup. Peut-être est-ce mauvais signe ? Que peut-on dire de plus à ce sujet ? Le Centre Culturel Les Arques, dans "La Grange Vieux". Peut-on ajouter, dire demander autre chose à ce sujet ?
...

DD** : En fait, nous avions plutôt choisi de rassembler plusieurs objets, d'inviter plusieurs artistes et acteurs dans un même endroit. Certains étaient en résidence, certains ne l'étaient pas. Michael Beutler par exemple, passait dans le coin à l'occasion d'une exposition. Il nous a laissé quelques uns de ses travaux pour le Centre Culturel ?

DP** : Et ces acteurs dont tu parles ?

DD** : Oui, tous invités à participer au projet : les artistes locaux comme Patrick Vogel, le garage automobile du village voisin ou le constructeur de bateaux.

DP** : Peut-être est-ce parce que certains d'entre nous, je pense à Benjamin Valenza ou à ton travail avec Grégory Gicquel, soyons très concernés par l'artisanat, par cette question d'un usage plus fonctionnel des matériaux et procédures quel'usage qu'en fait le "grand art". C'est aussi le cas, dans une certaine mesure, des oeuvres d'Owen Piper, de Hendrik Hegray et bien sûr d'Emmanuelle Lainé. Cela non pas avec dérision ou condescendance, mais avec un véritable intérêt pour les artisans, les entreprises et les personnalités locales.

DD** : Ceux que l'on appelle avec détachement les "locaux" ? Il y a bien sûr les interventions de personnes qui habitent ou travaillent non loin des Arques. En même temps que l'on se parle, j'essaye d'envisager l'idée qui sous-tend ce projet, surtout, de quelle manièer tout le monde aura vécu l'expérience; d'imaginer quel en sera l'aboutissement. En principe, nous serons face à quelque chose de plus complexe qu'une simple présence formelle, qu'une exposition d'objets. J'ai cette idée que le finissage de l'exposition "The Magic Porridge Pot" en septembre ne sera pas tout à fait la fin. Ce sera peut-être au contraire le début d'autre chose.

DP** : Si j'essayais de dire quelque chose à propos des invités dans le Centre Culturel Les Arques ?

DD** : Ok.

DP** : Il y a cette sorte de collaboration, d'image de toi qui a été prise dans les environs par Liza May Post. Et Hendrik Hegray, qui a été très prolifique et actif dans ses sortes de dessins automatiques. Très gestuels et informels, iles ressemblent presque à des bandes dessinées / comic strip avec des personnages mutants. Et bien sûr, il y a ces invités "locaux" qui participents à "The Magic Porridge Pot" au Centre Culturel Les Arques : les grandes sculptures de Patrick Vogel, cette voiture compressée comme un hommage à César, John Chamberlain ou Maichael Landy; des sculptures en bois de M. Labroue Klébert, en forme de champignons (vénéneux, parasites et autre spécimen de la flore locale); la barque d'Olivier Rolland qui, même s'il est difficile à ce moment précis de savoir en quels termes, entrera en résonnance avec la sculpture monumentale sur trépied de Benjamin Valenza. Et Michael Beutler, qui expose demain aux Abattoirs à Toulouse. Il présentera au C.C.L.A des bâtons de bambou à l'apparence très chamanique, enroulés de fils de couleur. Alors, de la même manière que me reviennent des images de l'art traditionnel, de l'artisanat, et d'autres pratiques, je me souviens des "Barres de bois rond" ou "Lingots sauvages' comme je les appelle, d'André Cadere. Cela me rappelle aussi les travaux de Support/Surface, ou bien ceux de Fred Sandbach, cet artiste américain qui travaillait avec des ficelles colorées. Encore une fois, ces travaux font appel à un savoir-faire artisananl parfois novateur. Ainsi, je constate de nouveau que d'une façon ou d'une autre, ce savoir-faire, la nature festive de tout cela, semble vraiment être - au moins potentiellement - , plus sympathique et plus engagé dans ce type d'environnement, ce genre de contexte et d'opportunité.

DD** : Peux-tu nous parler de Kaiser Kraft ?

DP** : Kaiser Kraft ... Stéphane Barbier-Bouvet et Benjamin Valenza. Leur principale intervention a consisté à concevoir tous les éléments de design du Centre Culturel, comme par exemple le logo, pour lequel ils ont compressé dans un seul bloc toutes les lettres pour qu'il n'y ait plus de diagonales ni d'arrondis. Ils travaillent aussi sur le décor et la scénigraphie, interface entre l'exposition, les pierres et le mortier qui composent la vieille grange.
Encore une fois on se retrouve confrontés à des problématiques d'ordre pratique et éthique quant à la compréhension, ou au contraire à la rupture, qui doit être opérée vis à vis de l'architecture et de son apparence et de quelle manière elle peut accueillir au mieux le dispositif d'un point de vue pratique et esthétique. Si je comprends bien, ilsréalisent actuellement et eux-mêmees la plus grande partie du chantier, tout le travail physique, alors qu'ils disposent d'un très cours laps de temps.

DD** : Le C.C.L.A génère beucoup de travail ...

DP** : Ma participation à tout cela consiste en un travail de prose que j'ai écrit, une ou deux choses que j'ai réussies à définir et à écrire comme des notules inutiles qui ont générées une forme d'imagerie phrasée de manière prosaïque. Certaines d'entre elles font d'ailleurs référence à cette vieille grange. Dans une certaine mesure ec bâtiment a influencé plusieurs aspects de ce que nous avons réalisé, et comme tu le dis, a généré du travail.

DD** : Exactement ?

DP** : Ca nous a certainement influencé de quelque manière que ce soit.

DD** : Tu es en quelque sorte l'écrivain public et Hendrik à quant à lui mis en place un atelier d'imprimerie... Et le gift shop.

DP** : Le gift shop, oui c'est vrai, avec les céramiques : des mugs avec des nez à la place des poignées. Il y a aussi des t-shirts peints ?

DD** : Oui, Owen découpe en ce moment des pommes de terre...

DP** : Ah, des impressions à la pomme de terre...

DD** : Sur des t-shirts, ce sont des numéros de téléphone...

DP** : Ah, les numéros de téléphone, qui apparaissent aussi dans sa production incroyablement prolifique de toiles.

DD** : Il fait aussi des ... - Owen, ce sont des lampes ? Il est parti.

DP** : Tu veux parler des disques microsillons recouverts d'enduit ? Il a aussi fait une peinture qui ressemble à ce qu'il a fait avant, ces toiles similaires à des disques d'or, de platine, de plomb ou même tout simplement des disques vinyles.

DD** : Le Centre Culturel sera installé au milieu de nulle part. Et au gift shop du C.C.L.A seront vendues plusieurs éditions d'artistes en résidence.

DP** : Oui, mais ils seront tous faits à la main. D'accord, Hendrik utilisera la technologie de la photocopie, mais sinon il s'agit surtout d'objets faits main, sortes d'incarnations actuelles - pour évoquer encore une fois quelque chose qui a beaucoup d'importance pourta pratique et celle de Grégory Gicquel - des idéaux des "métiers d'art" de William Morris. Peut-être que, de la même manière, cette idée que nous sommes "tenus" à distance nous fait penser au Land Art, à l'entropie de Robert Smithson. Et puis il y a ces choses que je me souviens avoir identifiées comme étant en connexion avec ton travail. Par exemple, le "Cre leisure" (creative leisure ou loisir créatif) de Helio Oiticica, qui n'était ni de l'ordre de la productivité, ni de la consommation ou des supposés "loisirs" mais qui était vraiment au-delà de tout cela. Et d'autres idéaux, comme les concepts-art au noms bizarres de Henry Flynt : la "Brend" et - je ne sais pas si je peux prononcer celui-ci - le "Innperseqs" ou le "Veramusment" qui remplace l'art et la culture institutionnalisée. Et le "Meaningless Work" proposé par Walter De Maria.

DD** : Et des acheteurs, s'ils souhaitent acquérir l'une de ces éditions bon marché...

DP** : Ah, il y aura des termes, des conditio.ns, des renoncements; ce ne sera pas simple ?

DD** : Le Centre Culturel Les Arques est le seul endroit où l'on peut trouver des oeuvres à bon marché des artistes qui sont ici. C'est le seul endroit dans le monde où tu peux trouver un multiple d'Owen Piper à dix euros.

DP** : Ok, et on ne peut ... Il n'y a pas de vente par correspondance. Tu dois, ils doivent finalement ...

**DD & DP***: ... Venir ici.

DP** : Mohammed doit venir jusqu'à la montagne - à moins que ce ne soit la montagne qui doive venir à Mohammed. C'est une bonne chose !
Et puis je voulais parler de l'une des premières personnes, je pense, à être venue ici avec une idée de ce qu'elle voulait faire : Michelle Naismith. Je ne sais pas si elle est arrivée en connaissant déjà le titre de son film. Si je tentais de définir son travail, je dirais qu'il finit par être un film sur une sorte d'institution fictive, qui semble avoir quelque chose à voir avec la réhabilitation des personnes. Tous ces scénarios adoptés, à la fois ici et ailleurs, comme si cela faisait partie de leur ... Comme si ces individus étaients conditionnés pour pouvoir réintégrer la société ou leur travail après une sorte de maladie ou quelque chose comme ça.

Les Arques, juin 2012

The magic Porridge Pot

22e résidence d'artistes

Du 21 Avr. au 30 Sept. 2012

Daniel Dewar, artiste

Présentation

Madame, Monsieur

Pour cette édition de la résidence d’artistes des Ateliers des Arques, l’artiste Daniel Dewar (la moitié du duo qu’il forme avec Grégory Gicquel) a été nommé directeur de Programme sur la proposition de Madame Charlotte Laubard (Directrice du CAPC, musée d’art contemporain de Bordeaux).

Daniel Dewar a choisi et invité des artistes pour l’intérêt qu’ils portent à la collaboration, l’échange et l’expérimentation.

Le projet s’intitule « The magic Porridge Pot ». Une exposition collective ou même, une œuvre croisée réalisée par les résidents des Ateliers des Arques.



Parmi les nombreux emplacements investis dans le village, une ancienne grange devient Le Centre Culturel Les Arques (CCLA). Y sont présentés un ensemble hybride de travaux des artistes résidents aux côtés d’œuvres d’artistes locaux mais aussi un ensemble d’objets qui ne sont pas des œuvres d’art. Le CCLA est composé de deux espaces. L’un est un espace d’exposition. L’autre, la boutique, vend des éditions d’artiste à des prix très abordables.

Chaque artiste a produit un travail spécifique.

Owen Piper : Des peintures sur toile en technique mixte. Un tableau est offert en cadeau à chacun des habitants du village. Aussi, des peintures en lettres pour les devantures de magasin, inexistants aux Arques.

Douglas Park : De la prose littéraire, de l’art écrit, mais aussi la prose littéraire et l’art écrit au lieu de textes critiques. Des essais relativement conventionnels aussi. En solo, en collaboration ou en contribution à projet. Les résultats varient de la publication, l’exposition, la lecture, l’enregistrement sonore ou en ligne.

Michelle Naismith : Un film qui surimpose l' »Institut des Arques » et Les Ateliers des Arques.

Benjamin Valenza : Un monument publique en plein air avec art video et film de genre.

Liza May Post : Une collaboration avec autocuiseur, le cliché mental d’une sortie nocturne sur un parking.

Emmanuelle Lainé : Un environnement « d’atelier » (des outils, des matériaux et d’autres « évidences’ d’un « travail » et d’une « productivité ») constitué et présenté dans une chambre de verre.

Hendrik Hegray : Des éditions imprimées mariant les genres fanzine et livre d’artiste. Un nombre de croquis automatistes et gestuels, images d’êtres mutants.

Kaiser Kraft (Stéphane Barbier et Benjamin Valenza) : Design et scénographie du Centre Culturel Les Arques.

Le CCLA convoquera aussi les sculptures de grande échelle de Patrick Vogel, une voiture comprssée du garage Ciercolès, des cèpes et des morilles en bois de Mr Labroue Klébert, une barque réalisée par Olivier Roland et des œuvres de Bamboo Art offertes par Michael Beutler.

By order, Douglas Park

Les Arques, le 18 juin 2012


Les artistes

Owen Piper

Owen Piper archive des idées, c’est certainement la caractéristique la plus intéressante de sa pratique. Produisant en moyenne trois peintures par jour, Owen s’inspire de tout : les chaussures de football, les habitudes animalières, la junk food, la mode… Cette collection compulsive de références éclectiques révèle un flux journalier de trouvailles qu’il régurgite dans des compositions souvent abstraites et colorées. Dotée d’un fort aspect « readymade » bien et loin d’être lyrique, la pratique irrévérencieuse d’Owen Piper est fermement ancrée dans l’actualité.

Owen Piper (London, 1975) vit et travaille à Glasgow. Il est diplômé de Newcastle School of Arts et a obtenu un Master of Fine arts à Glasgow en 2001.

Douglas Park

arfois, lorsqu’on navigue dans les eaux de l’art, une question inattendue nous arrive à l’oreille, remplaçant l’habituelle « Que fait cet artiste ? » par un « C’est qui ce mec ? ». Douglas Park a fait basculer les réflexes interrogatifs. Car ici la balance hésite en permanence et doucement entre la personne et la pratique.
Douglas Park est un artiste anglais, vivant dans le sud de Londres. Il est peut-être dans le top dix des artistes les plus connus de la scène londonienne, bien que, précisément, on ne sache pas précisément ce qu’il fait, ce qui ne préoccupe personne, car c’est, en l’occurrence, une mauvaise question.
Entre la mascotte et le socializer à l’américaine, associée d’érudition frénétique, Douglas Park est celui qui cherche à sortir des travers qui font de lui un personnage.
Connaissant ce que personne ne connaît (par goût, par luxe ou par devoir civique on ne sait pas), il est devenu l’encyclopédie vivante des pratiques les plus obscures : amateurs, fous en tous genres, œuvres perdues et disloquées, groupes improbables, scandales étouffés, parias, professionnels hors catégories, qui consituent une deuxième histoire de l’art, non pas que cette histoire alternative souhaite aspirer à de quelconques lettres de noblesses, mais plutôt parce qu’elle est le terrain méconnu sur lequel se forme l’indispensable et grande Histoire de l’Art. Douglas Park est le connaisseur des « artistes pour artistes », ceux dont, parce qu’ils passent sous les radars de l’académie, on imite, dans certains cas, les meilleures idées. Il devient aussi le défenseur de nouveaux rôles, ceux qui, ne suivant pas avec orthodoxie les clous d’une carrière artistique, deviennent, par façon d’être et parfois par accident, des agitateurs.
Récitateur d’anecdotes et d’épisodes capitaux de l’histoire de l’art moderne, à n’en plus finir, il poursuit inlassablement une double quête d’évangélisation à la cause de l’art et au récit. Ces lectures frôlent avec la fiction, le moment où l’événement vrai rejoint la création artistique en évitant la neutralité documentaire. Ce qui est adjacent prend alors une place centrale. La légende est sa source. Et les individus valent autant que les objets, les moments et les actions prévalent sur les lieux, et donc, pour reprendre une formule connue, l’art se confond avec la vie. Il faut donc être exemplaire.
En prêcheur expérimenté et obsédé par le détail, Douglas est entouré de fidèles supporters et en profite pour agir avec de multiples groupes déterminés et indéterminés, des groupes comme ceux qu’il a dans la tête. Il prendra le rôle de l’acteur, du performer ou du critique d’art, et deviendra, comme dans chacune de ses collaborations une mémoire vivante et fiable de l’action collective.
Il est celui qui ajoute, en apportant avec modestie une personnalité comme symbole visible et en faisant dévier ce qu’on lui propose. De portrait, de lui-même et d’autres personnes, il est toujours question avec Douglas Park. Mais les dizaines et les dizaines de portraits qu’on a fait de lui, les hommages, forment un ensemble s’agrandissant qui cache les particularités d’un prose et d’un style omniprésent. Constituées de ricochets, mobiles et divagantes, les performances de Douglas sont les cours de celui qui a vécu l’histoire en direct et retranscrit, conteur sur-documenté, un ensemble hallucinatoire de sensations et de faits. L’adepte de la parenthèse et de l’insert, des déclinaisons de mots et d’évènements historiques, l’homme fasciné pouvant encore tout savoir dire et tout dire, reste un modèle, dans sa capacité à transformer en forme plastique absolument tout, du mot à l’image, ce qui lui tombe sous la main et entre les oreilles.
©2015, pour l'ouvrage Douglasism, ed. Workroom Press, Séoul

Michelle Naismith

Liza May Post

Liza May Post est une artiste plasticienne néerlandaise. Elle est diplômée de la Rietveld Academy d'Amsterdam où elle a étudié de 1988 à 1993. De 1994 à 1995, elle a prolongé ses études à la Rijksacademie d'Amsterdam.
Le comportement humain et ses dimensions psychologiques sont au centre des films et des œuvres photographiques de Liza May Post. Post examine les attitudes, les mouvements, les acti

Kaiser Kraft

Duo formé de Benjamin Valenza et Stéphane Barbier Bouvet.

Emmanuelle Lainé

Née en 1973 à Paris, Emmanuelle Lainé est diplômée de l’ENSBA à Paris. Elle vit et travaille entre Paris, Bruxelles et Marseille. Elle a récemment exposé à La fondation Ricard (Paris), au GLstrand (Copenhague) ou à la Biennale de Lyon, mais aussi à C-o-m-p-o-s-i-t-e (Bruxelles), à l’Institut Culturel Suisse (Rome), à la Galerie (Noisy-le-Sec), au Palais de Tokyo (Paris) et à la Biennale de Belleville (Paris).

Les expositions d’Emmanuelle Lainé sont liées aux contextes qui les accueillent. Elle assemble objets trouvés et éléments personnels qu’elle combine avec de nouvelles pièces produites in situ. Elle laisse apparaître l’inattendu et la coïncidence, évitant toujours les contrôles méticuleux. Il s’en dégage des vastes installations hétéroclites qui donnent l’apparence d’un chantier en construction, portant sa propre mémoire. Cette mémoire se construit notamment grâce à la réalisation de grandes images photographiques numérique à échelle 1 qui créent des effets de réalité augmentées avec leur propre environnement. L’artiste produit ainsi des dispositifs complexes qui génèrent une sensation de désorientation visuelle autant que de coalescence organique, des natures mortes qui s’imbriquent les unes aux autres.

Hendrik Hegray

Hendrik Hegray est né en 1981 à Limoges. Il vit et travaille à Paris.
Il pratique le dessin, la musique, la performance, la photo, la vidéo, la sculpture.
Influencé à la fin des années 90 par les mouvements liés au graphisme et au dessin underground, il publie de nombreux fanzines à des tirages confidentiels, avec une implication particulière dans le domaine de l’auto-édition. Il publie également des livres chez les éditeurs Nieves et Orbe, et collabore ponctuellement avec Julien Carreyn ou Héléna Villovitch. C’est avec Jonas Delaborde, qu’il crée les revues « Nazi Knife » en 2006 (dont le 10e numéro vient de paraitre aux éditions Paraguay) et « False Flag » en 2010, dans lesquelles ils accueillent des artistes tels que Julien Carreyn, CF, Dewar & Giquel, Cameron Jamie, Lee Scratch Perry, Antoine Marquis, Terry Johnson, Lili Reynaud-Dewar, David Douard, Tonetta, Andrés Ramirez, entre autres. Ces publications débordent très vite du cadre strict du dessin pour aborder et explorer les possibles de la photographie, de la sculpture ou du collage, pratiques qui convergent aujourd’hui dans le travail de l’artiste, parallèlement à une recherche musicale et performative, reflet sonique de ses expérimentations visuelles.


Catalogue

Conception éditoriale : Daniel Dewar et Hendrik Hegray
Graphisme : Armelle Pitot-Belin
Éditeur : Les Ateliers des Arques, résidence d'artistes
Imprimeur : France Quercy, Mercuès
Format : 33,4 x 24
Prix : 12 euros